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Gay.mais.pas.que
11 janvier 2011

Le mouton trop occupé

Je suis un mouton. Un mouton tout ce qu’il y a de plus ordinaire. Un mouton à quatre pattes avec de la laine sur le dos. J’ai deux oreilles et une petite tête qui plait aux enfants – et aux adultes aussi de temps en temps. Ma journée de mouton a été paisible jusqu’à maintenant. Je n’ai pas à me plaindre. J’ai été bien traité par les bergers.

On m’a mis dans un pré, un champ. Je ne sais où, en réalité. Sans doute là où on parque tous les moutons comme moi : ceux qui ne demandent rien de spécial, ceux qu’on utilisera bien assez tôt et dont il ne faut pas trop s’occuper. Des sortes de « moutons autonomes » d’une certaine façon. On les pose là et ils s’occupent tous seuls : ils broutent un peu d’herbe et bêlent de temps en temps pour rappeler qu’ils existent.

Je ne suis pas un mouton exceptionnel, donc. Ma laine n’est pas la plus belle du troupeau. Ma viande ne sera pas non plus la meilleure. Il n’y a pas de façon de me reconnaître quand je suis au milieu du troupeau. Et même quand je suis seul, on ne peut pas me donner de nom. Je n’ai pas de nom, je suis un mouton – parmi d’autres.
Comme tous les moutons de mon espèce, je suis un animal craintif. Dés que l’on s’approche de moi, je m’échappe en faisant de petits sauts assez ridicules. Je ne peux pas m’en empêcher ; ça doit être génétique. Pour sûr, je ne suis pas un bouc ! Je n’oserais jamais foncer dans le tas, comme on dit, même si parfois j’envie ce cousin téméraire… Mais il a si mauvaise réputation ! Non, non, je préfère rester un mouton, docile et effacé.
Notre plus grande peur à nous, les moutons, c’est qu’un prédateur nous attaque. Un loup, un renard ou un ours peut être. Nous sommes toujours aux aguets et nous nous regroupons quand le danger approche. Peut être est-ce une façon de nous rassurer les uns les autres ? D’avoir moins mal si , la faute au destin, on se fait égorger ? Evidemment nous ne nous rendons pas compte que notre plus grand prédateur est celui qui nous nourrit…

Je suis un mouton sage mais depuis quelques temps j’ai des envies de libertés. Je ne sais pas pourquoi, cela m’a pris d’un coup, comme ça, sans crier gare. Je me suis dit que l’herbe était peut être meilleure ailleurs et que je pouvais peut être faire autre chose, justement, que brouter de l’herbe toute la journée. Je ne sais pas exactement quoi, mais voir du pays ou, du moins, avoir l’impression d’avoir fait mes propres expériences… Mais je ne suis qu’un mouton. Je suis tellement concentré sur le moyen de passer par-dessus cette clôture qui m’entoure que je suis incapable de voir l’entrée du pré que le berger a laissé ouverte. Mais quand bien même je m’échappais de cet enclos, que ferais-je à l’extérieur ? Sinon me laisser mourir, dévoré par un loup, un renard ou un ours ? Qui se serrera contre moi quand le danger approchera si je quitte le troupeau ?

Nous, les moutons, nous ne sommes pas des animaux compliqués. Nous n’avons ni buts ni prétentions. Nous n’avons pas d’existence à proprement parler. Nous existons certes, mais nous sommes interchangeables les uns avec les autres. Quand j’aurai fini de donner de la laine et que le soir sera venu, je serai sans doute mangé à la Pentecôte ou à Pâques. Avec ma peau on fera un manteau ou un sac. Je serai utile, mais je ne serai plus là pour m’en féliciter…

Du coup, je continue à fixer cette maudite barrière qui borde mon pré. Je trouverai peut être le moyen de passer par-dessus, qui sait ?


A partir de demain je serai un mouton anglais Quelques jours (pas beaucoup) de vacances à Londres.
A bientôt

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Commentaires
P
Marrant comment j'ai cru que tu parlais de moi ??
S
Je ne t imaginais pas comme ça mais bon je vais m' y faire....
C
Bonne transhumance alors. Et attention à la CB car il y a les soldes aussi à Londres je crois.
T
Méfie toi du Loup disait Monsieur Seguin à sa chèvre Blanquette...<br /> Un mouton qui a conscience d'être un mouton n'est certainement pas un mouton ordinaire. Est-il vraiment un mouton ? Ou un autre genre d'animal que l'on a convaincu qu'il était un mouton ?
L
Oui, tu as raison... Viens ! N'aie pas peur ! L'herbe a un parfum merveilleux de ce côté-ci de la barrière. Je ne te ferai pas de mal, au contraire : je te montrerai les plus belles prairies, d'un vert comme tu n'en as jamais vu dans ton enclos, je te montrerai les plus belles fleurs qui y poussent. Les autres moutons n'ont pas ta curiosité, eux ne méritent pas d'herbe aussi fraiche que celle qui pousse ici. Toi, oui. Alors viens...
Gay.mais.pas.que
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