Pub au kilo
Ce midi j'ai reçu un peu plus d'un kilo de publicité dans ma boîte aux lettres. Aucune autre missive, pas de courrier : rien que des pubs. Glacées, colorées, bariolées, irisées, bigarrées. Éclatantes de promesses et de dynamisme commercial. Chacune y va de son clin d'oeil...
Quand j'ai tourné la clé pour découvrir fébrilement le contenu de ma boîte aux lettres, celle-ci a littéralement vomi ce trop plein de brochures qu'elle gardait en elle depuis le matin, attendant mon retour pour que je l'en libère enfin. J'avoue que j'ai été assez dépité de constater à quel point nos vies ne se résument plus guère qu'à de la consommation à outrance. A tous les égards, nous ne sommes plus que des consommateurs.
Nous achetons des centaines d'objets dont on se demande pour la plupart à quoi ils pourront bien nous servir, sitôt passé le moment fugace de la nouveauté. Nous avalons des kilomètres de contenus que ce soit sur Internet, à la télévision, au cinéma, dans nos MP3. Nous nous gavons de nouvelles technologies toutes plus pernicieuses les unes que les autres. Nous mangeons plus qu'à notre fin, tout ce qui nous passe sous la main sans chercher à savoir ce que c'est réellement, d'où cela provient et comment on le fabrique. Nous consumons nos sentiments sur l'autel du rythme effréné de nos vies qui ne doivent jamais prendre le temps de faire une pause. Nous brûlons notre énergie et l'énergie de notre planète à courir partout, pour rien....
Bref, nous consommons sans rien savoir faire d'autre.
La folie de Noël s'est, cette année encore, emparée de nos porte-monnaie à défaut de s'emparer de nos coeurs. Une fois de plus, nous battrons des records pour offrir LE cadeau. Celui qui rendra CE Noël inoubliable, du moins le croît-on, pour celui ou celle qui recevra notre présent. Interrogeons nous un instant, s'il vous plaît. Considérez quelqu'un qui est très attaché à vous. Pensez-vous que son plus grand bonheur soit que vous lui offriez un I-Phone, un I-Pad, une Nespresso, une Wii peut être ? Ou croyez-vous que son plus grand bonheur soit de recevoir de vous ce qu'on ne peut pas acheter, ce qu'on ne peut pas négocier, ce qu'on ne peut pas échanger sur E-bay : votre amour ?
"Oui, oui, c'est bien gentil de dire ça mais vivre d'amour et d'eau fraîche... on connaît la chanson !" Je vous reçois 5 sur 5. Je suis d'accord avec vous. Offrir son amour ça ne veut rien dire. Et c'est bien ce qui est le plus grave ! On ne sait plus ce que ça veut dire offrir son amour. Je vous le fait court : globalement on s'imagine que la grandeur d'une preuve d'amour est proportionnelle à la valeur marchande d'un cadeau. Autrement dit, plus on offre du cher plus on dit à l'autre qu'il nous est cher (lui aussi). Tout au fond de vous, êtes vous certain que ça fonctionne ainsi ?
Peut être que cette année, plutôt que de donner sans compter des choses futiles déversées dans les supermarchés par les industriels bien avisés, on devrait ce contenter du minimum. Offrir un petit présent, l'envelopper dans un joli papier doré et le remplir de toute notre affection, à la manière du gamin qui offre un collier de nouilles à sa maman. Offrir vraiment et ne pas faire semblant de respecter une coutume idiote qui voudrait qu'on offre toujours plus. Peut être qu'offrir son amour c'est juste dire à l'autre que l'on est là. Qu'il peut compter sur nous, sur notre soutien, notre écoute, notre patience, notre aide, notre indulgence et notre respect ? Peut être que c'est juste dire qu'on est heureux d'être avec lui et que sa seule présence vaut tous les cadeaux ? Peut-être que c'est profiter des moments passés ensemble comme s'ils étaient les derniers ? Peut être qu'offrir son amour c'est offrir de beaux souvenirs à l'autre et s'offrir de beaux souvenirs à soi ? C'est peut être bien la seule chose qui nous restera quand nous serons vieux ou morts : nos beaux souvenirs. Peut être alors nous dirons-nous que nous avons eu raison, cette année là, d'offrir notre amour.
Pour illustrer ce billet, je vous propose la photo non truquée du contenu intégral de ma boîte aux lettre d'aujourd'hui. Sachant que tout va... à la poubelle sans même être lu. Je sais, je ne suis pas un bon client...
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