Jeudi 16 juin 2011 - 22h49
Après cinq heures de route assez pénibles je suis enfin arrivé chez ma sœur. Ma sœur est une dissidente. Elle s’est volontairement coupée de sa famille lors de son divorce. Dans ma famille on ne divorce pas, a fortiori quand on a des enfants. Dans ma famille on est pas gay non plus. Dans ma famille on est bien sage et bien propre, du moins en apparence, pour les voisins et le qu’en dira t on. Quelque part j’admire le courage qu’elle a eu de dire stop à son ex mari gentil mais alcoolique, de dire stop à l’ingérence de mes parents, de dire stop à cette vie trop étriquée qu’elle s’était tricoté sous la pression des autres. Elle a suivi son instinct, sans doute aussi sa colère et son bon sens d’une certaine manière. Elle a divorcé et s’est remariée avec un homme qu’apparemment elle aime énormément…
…Ou alors elle fait n’importe quoi est se désengage d’un côté pour s’engager de plus belle de l’autre ? As-t-elle eu raison de fuir la vie qu’elle avait choisie ? A-t-elle le droit de couper les ponts avec sa famille ? Je dois avouer que je me pose la question assez souvent.
Je prends mon cas pour tenter de raisonner objectivement. Mes parents n’acceptent pas mon homosexualité. Tout du moins je ne suis pas le bienvenu si je tente d’en parler et ils m’ont clairement signifié qu’ils ne voulaient pas rencontrer mon éventuel ami. J’aurais pu, comme ma sœur, couper les ponts et leur dire “je ne serai plus une gêne pour vous, au revoir !”. Mais je n’ai pas le courage de passer un cap aussi radical. Dans le même temps, je me dis que le courage, finalement, c’est de ne pas baisser les bras. Si je ne me confrontais pas à eux, pourrais-je grandir ? Je pense que si la question de l’homosexualité en tant que tabou social ne m’était pas posée par mes parents, j’aurais davantage de difficulté à évoluer sur ce sujet dans ma personnalité et dans ma vie de tous les jours. L’adversité me donne sans doute encore plus envie de m’affirmer, de me revendiquer tel que je suis. Peut être que je suis blessé par les propos de mes parents à mon égard… mais peut être aussi que je me sens encore plus l’obligation de leur faire comprendre, de leur expliquer, de leur prouver qu’ils ont tort. Peut être que persister et signer c’est ma façon à moi de faire un pied de nez à leurs idées toutes faites et hors du temps.
Je crois que ma sœur et moi n’avons pas la même façon d’appréhender les choses. En attendant, bien que l’ambiance ici soit assez glaciale, je passe du temps avec mes neveux et nièces et je me change un peu les idées …