Pire souvenir de réveillon
Hier à la radio, un chroniqueur interviewait une personnalité sur son pire souvenir de réveillon de Noël. Entendant cela, je me suis mis à gamberger pour essayer de savoir quelle aurait été ma réponse si on m'avait posé la question.
La première réponse [oui, il y en plusieurs] aurait pu être "tous les 24 décembre où j'ai été malade comme un chien". Quand j'étais petit, j'étais systématiquement malade pendant les vacances scolaires et celles de Noël ne faisaient pas exception bien sûr [du coup, je n'ai quasiment jamais manqué la classe]. Entre les angines, les bronchites, les otites, les rhumes, les boutons de fièvres, j'en passe et des meilleures, j'ai passé beaucoup de réveillons fiévreux ! Je devais sans doute faire une sorte d'allergie ou quelque chose comme ça, mais ça ne gâchait pas pour autant mon plaisir (enfin, pas trop)...
Une autre réponse aurait pu être "le 24 décembre où mon père a jeté les cadeaux par la fenêtre". Ah, quel grand souvenir ! L'histoire avait commencé bêtement. Tellement bêtement d'ailleurs que je ne me souviens plus très bien de l'origine de cette mémorable scène. Il me semble qu'il était question d'une nappe qui n'allait pas ou un truc approchant... Je me rappelle que les paquets étaient soigneusement disposés sous le sapin et je revois très bien mon père les attraper un par un et les jeter dans le jardin par la porte de la maison grande ouverte. Puis il est monté se coucher. Grosse ambiance ! Je ne crois pas que ma mère ait tenté de nous réconforter, mes soeurs et moi. Il me semble qu'elle a juste crié aussi fort que mon père et qu'elle a claqué une ou deux portes en passant.
J'avoue que je ne me souviens pas de la suite de la soirée. Je suis certain que le réveillon s'est poursuivi et que mon père est finalement sorti de sa chambre pour se joindre à nous et aller récupérer les paquets dans le jardin, mais je ne sais plus comment se sont déroulées les négociations "inter-parentales" pour permettre à la fête d'avoir quand même lieu.
Une troisième réponse [celle que j'aurais donné je crois] est "le 24 décembre où j'ai été puni". Il faut que je vous raconte cette soirée mémorable. Je crois que j'étais en CE2 (j'avais donc 8 ans environs). Ce soir là on avait fait une partie de Scrabble (wouhou ! on savait s'éclater en famille...). Sur le plateau de jeu, les trois lettres C O N avaient été placées judicieusement par je ne sais plus qui pour former le délicieux gros mot que tout le monde devine. N'ayant pas beaucoup de jugeote et pensant faire de l'humour dans cette soirée "de folie", j'ai montré le mot en question du doigt et j'ai tout naturellement dit "ça, c'est papa". Pas bien ! Je n'ai guère eu le temps de comprendre que j'aurais mieux fait de me taire car en un quart de seconde je me suis retrouvé enfermé à double tour dans ma chambre. J'ai alors commencé à réaliser que ce Noël 1980 allait avoir comme un drôle d'arrière goût.
Je suis resté un bon moment dans ma chambre à pleurnicher en expliquant vaguement que je n'avais pas fait exprès d'ouvrir ma bouche, et peut être même que je regrettais d'avoir insulté mon père. Dans mon souvenir, je crois réellement que je n'avais pas d'intention méchante en disant "Papa est con". Ça peut paraître difficile à comprendre, mais être con à l'époque, pour moi, n'avait pas vraiment de signification... Toujours est il que mes parents ont fini par céder. Ils m'ont libéré de ma prison et je m'en suis tiré avec juste quelques coups de martinets (pas très forts d'ailleurs, si je me souviens bien). Le réveillon a donc eu lieu, et cette année là je crois que j'ai été particulièrement gentil tout le reste de cette longue soirée de veille.
Ce sont trois souvenirs que j'avais écartés de ma mémoire. Je ne me remémore avec précisions que de quelques scènes mais je dois reconnaître que les détails sont un peu flous. En cherchant bien, je pourrais trouver encore d'autres 24 décembre pourris, mais ça n'a pas grand intérêt.
Cette année, pour la première fois en 38 ans, je m'apprête à passer le 24 décembre tout seul. Contrairement à ce que je pensais jusqu'à il y a encore quelques semaines, l'échéance ne m'angoisse pas. Noël est la période de l'année durant laquelle je travaille le plus et chaque année inlassablement je rejoue le même scénario. Je cours toute la journée, je roule des heures, je prends un apéritif en arrivant et... je finis immanquablement par m'endormir avant la fin du repas, alors que tout le monde est frais et dispo (ils sont en vacances, eux). Alors cette année, je serai moi aussi frais et dispo en n'arrivant que le 25. Ce sera mon cadeau de Noël de-moi-pour-moide-moi-pour-moi : pouvoir enfin me reposer un peu, à moins que Noël 2010 ne devienne mon nouveau pire souvenir de réveillon....